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Le pourvoi en cassation

Le pourvoi en cassation est, en matière civile, formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation par l’intermédiaire d’un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation (sauf en matière d ’élection où il peut l’être par la partie elle-même ou par tout mandataire muni d’un pouvoir spécial 1).

Le délai est « de deux mois, sauf disposition contraire », et court à compter de la notification de la décision attaquée.

En matière pénale, la déclaration de pourvoi doit être faite au greffier de la juridiction qui a rendu celle-ci, et ce dans un délai de cinq jours du jour du prononcé.

Le pourvoi, qui obéit ensuite à certaines règles de procédure dans le détail desquelles il n’est pas de l’objet de cette présentation générale d’entrer, s’attaque, par définition, à une décision. Ce qui pose la double question de la nature de la décision qui peut faire l’objet du pourvoi, et des motifs pour lesquels elle peut être attaquée.

En matière civile, le pourvoi n’est ouvert qu’à l’encontre d’une décision rendue en dernier ressort. Mais, sous certaines réserves, il faut, en outre, qu’elle ait été prononcée sur le fond de l’affaire, c’est-à-dire au moins sur « une partie du principal », ce qui exclut les jugements ordonnant une mesure d’instruction ou une mesure provisoire ; ceux-ci ne peuvent être frappés de pourvoi que ultérieurement, en même temps que la décision qui est ensuite rendue sur le fond.

Pour obtenir une cassation, la partie qui forme le pourvoi doit établir la non-conformité de la décision attaquée aux règles de droit. C’est ce qui explique qu’est exclue toute discussion portant sur les faits, faits que la Cour de cassation ne contrôle pas et dont l ’appréciation relève du pouvoir souverain des juges du fond.

En matière pénale, “les arrêts de la chambre de l’instruction et les arrêts rendus en dernier ressort en matière criminelle, correctionnelle et de police peuvent être annulés en cas de violation de la loi…”. Les décisions avant dire droit obéissent ici à un régime particulier, lequel permet, sous certaines conditions, de saisir le président de la chambre criminelle d’une demande d’autorisation d’un pourvoi immédiat. A la violation de la loi, le code de procédure pénale ajoute différents cas qui font une large place aux vices de forme, textes qui se trouvent aujourd’hui renforcés par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme.

De façon générale, que ce soit en matière civile ou pénale, le contrôle de la Cour de cassation relève en définitive de deux grandes catégories : le contrôle normatif et le contrôle dit disciplinaire.

Le contrôle normatif s’exerce essentiellement par la réponse faite à des moyens de violation de la loi (civile ou pénale) ou de défaut de base légale (en matière civile). 

La violation de la loi, c’est celle non seulement de la loi proprement dite au sens constitutionnel du terme, mais aussi des textes réglementaires, de la coutume et surtout des traités internationaux dont l’article 55 de la Constitution pose le principe de leur supériorité par rapport à la loi interne : à ce titre, il faut spécialement citer le droit communautaire. 

Quant au défaut de base légale, il n’implique pas nécessairement une appréciation erronée du droit par le juge du fond, mais suppose que le juge n’a pas suffisamment justifié sa décision. 

A ces cas s’ajoutent principalement la dénaturation d’un écrit, le défaut de motivation et le défaut de réponse à conclusions. 

C’est par excellence le domaine où peut se manifester la démarche unificatrice – et souvent novatrice – de la Cour de cassation quant à l ’interprétation à donner à une règle de droit, qu’elle soit de fond ou de procédure, qu’elle soit ancienne ou nouvelle. 

C’est essentiellement ici que s’élabore jurisprudence de la Cour de cassation, sur laquelle on reviendra plus loin.

La notion de contrôle disciplinaire – suivant une expression depuis longtemps consacrée- concerne d’abord les obligations qui s’imposent aux juges quant à la façon dont ils doivent rendre et rédiger leurs décisions. Il s ’agit d ’assurer le respect par les juges du fond de leurs obligations en matière d’exposé des prétentions et moyens des parties, de réponse aux conclusions, de motivation des jugements et arrêts.

L’exigence de motivation recouvre non seulement l’obligation d’énoncer des motifs à l’appui du dispositif, mais aussi celle de ne pas se contredire, de ne pas user de motifs hypothétiques ou dubitatifs et de ne pas employer des motifs inopérants, c’est-à-dire qui ne constituent pas une réponse au moyen soulevé.

La dénaturation du sens clair et précis d’un écrit se rattache aussi au contrôle disciplinaire en matière civile.

Dans une acception large, relèvent aussi du contrôle disciplinaire les griefs qui invoquent une méconnaissance des obligations déontologiques des juges, et plus généralement des composantes du procès équitable : principe de la contradiction, notamment lorsqu’un moyen est relevé d’office ; principe d’impartialité ; principe de la publicité des audiences ; jugement dans un délai raisonnable.

Le principe d’impartialité, appliqué à la lumière de l’article 6§1 de la Convention européenne des droits de l’homme, a, en particulier, connu des développements jurisprudentiels qui ont entraîné des conséquences importantes sur le fonctionnement même des juridictions, ou des organismes qui leur ont été assimilé, tels que les autorités administratives indépendantes.

Ce contrôle disciplinaire, ainsi largement entendu, représente une lourde charge pour la Cour de cassation, car un très grand nombre de pourvois invoquent un ou plusieurs moyens qui s’y rattachent. Il est toutefois impossible de l’éluder eu égard, d’une part, au nombre, à la diversité et à l ’hétérogénéité des juridictions dont la Cour de cassation contrôle les décisions, et d’autre part, à l’importance majeure des exigences du procès équitable dans un Etat de droit. 

L’ordre des avocats

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